mercredi 28 décembre 2011

Je me construis sur l'épiderme, pour de nombreuses raisons, pour l'apparence et l'apparat, pour tout ce que je crois voir; les sens qui de façon boiteuse lui obéissent, tous sont tournés vers l'extérieurs; l'intérieur, quant à lui, l'invisible intérieur farouche informe se précipite avec force, désespérément, vers n'importe quel objet du dehors, dont il s'empresse d'épouser la forme. Elle se déforme,si tant est que ce terme soit propre à désigner les métamorphoses (on dirait: démentielles) de ce tas indistinct, ce liquide.
   Qu'est Je, alors? C'est un chien qui gratte à la porte; il entend proférer derrière la porte, à son attention peut-être, les commandements de son maître: ce ne sont que des grognements indistincts; ou plutôt des grésillements, comme si un vieux magnétophone répétait inlassablement la même inintelligible séquence.
   Tu attends qu'on t'ouvre, tu implores, tu geins qu'on te donne ta pâtée spirituelle, qu'on t'a promise; tu sais que la vérité se trouve derrière cette porte où résonne la voix étouffée de ton maître; mais peut-être, derrière cette porte, il n'y a rien.

lundi 26 décembre 2011

Animaux-gouttes

   C'est quelque chose d'assez bizarre: j'ai inconsciemment croisé le passage du Lurker at the Threshold de Lovecraft où Stephen Bates regarde par une fenêtre et y aperçoit les espaces extérieurs avec Il libro sull'... de Buzzati où Giorgio Capranica entrevoit dans un livre de médecine des choses ressemblant à des mollusques, symptômes d'une maladie dont il est atteint.
                                    
  
Et ça a donné ça. Je me suis aperçu récemment du "malentendu" en relisant les deux oeuvres. Ce peut paraître moche, mais ça pourrait passer pour un effet de style vu que les deux passages ont en commun de mettre très mal à l'aise... Enfin, pensez-en ce que vous en pensez si vous en pensez quelque chose.

jeudi 15 décembre 2011

Pourquoi la "raison"?

On abuse de la raison. La raison est une des choses les plus épouvantables au monde. Mais il suffira de lire la suite pour voir où je veux en venir et en quoi j'avoue être d'elle, comme tout le monde, un infâme suppôt vain et servile. La raison n'est qu'un épiderme, accessoire, inutile; et un épiderme inconfortable, semé de clous; rien à voir avec notre bonne peau qui pour être fragile a le mérite de ne jamais, dans sa bêtise, nous trahir.
Organes vitaux, qui battent sans parole, voilà ce qu'il est d'important, ce qui domine et dirige aveuglément les mouvements épidermiques, ce qui bat, invisible, inaccessible hors du meurtre (qui en même temps qu'il les découvre, les détruit), et de son côté considère inaccessible le dehors... Que la parole, en résumé, est faible; que le raisonnement est mesquin.
Comme par ses propres propriétés je le balafre, je dis que je le balafre, il s'est replié dans une région plus reculée de la "pensée", ou plutôt les lieux à portée de mes coups de griffe, il ne s'y trouve pas; et ce qu'ici j'appelle "raisonnement", ce que je désigne par "il" ou "elle", ce n'est qu'une pancarte à son effigie; je ne frappe que des pantins de glaise qui grossièrement lui ressemblent; ou même, parce qu'il est roi de ce domaine, où je ne pourrais pas même être son fou, cela ne lui ressemble pas le moins du monde, cela n'est qu'un mot, un amas de lettres, de morphèmes; et ce n'est qu'arbitrairement supposé le représenter et prendre les coups que je lui destine, en prétendant que c'est bien la raison qui les prend. Oui, ce mot n'est qu'un petit animal, un prétexte, une pauvre armure derrière laquelle sans en avoir nul besoin, pour le seul plaisir de ses clients, la raison se cache voilée dans sa perfidie. Ce mot la recouvre autant qu'il la laisse entrevoir de tous ces milllions d'yeux lubriques.Voilà une chose infâme, qui recouvre la terre et qu'il est impossible d'humilier. On ne peut que la tuer, en cédant à la violence, en s'humiliant soi-même. En la magnifiant du même coup.
L'Absurde, humiliation de la raison? Non! Ce sont ses propres rejetons démoniaques, ils lui font honneur, au contraire! Nous sommes tous empêtrés dans le commerce de cette catin.
Elle ferait presque aimer la politique, qui est ce qui se rapproche le plus d'une huée de cette bouche d'égout encensée, portée au trône de déesse, un trône fait pour elle sur mesure, un trône indigne.

mercredi 30 novembre 2011

Hitface

Le "Nain étoilé" est présentement un "poème". A cette occasion, je me suis rendu compte que celui-ci et mon autre entité, Hitface, n'étaient qu'un reflet l'un de l'autre, ou à la rigueur deux jumeaux pas tout à fait du même âge. S'il est niais, c'est par faiblesse de ma part.

Coincé entre quatre yeux aveugles agacés
J'imagine la teneur d'un dialogue de sourds.
"Plan! Toitureuse hernie malodorante!
-Ta gueule tu n'es qu'une simple plante pleine de dents;
Que nul ne peut ni ne veut entendre."
Et vous vous demandez pourquoi
Oh! pourquoi mon oeil est peint d'un regard méchant?
C'est votre vernis, je le reconnais sur vos tempes, sur
Votre énorme nez d'hypocrite!
Ou ne serait-ce que l'effet ravageur
D'avoir assise à ma lentille une couleur si moche?
C'est la vôtre, elle devrait être votre rougeur
Et non la mienne de pauvre salamandre
Prise au piège empoisonné de votre reflet.
Vos baffes à mon illustre face gluante
Repartent sans autre transit à la vôtre étroite de hareng;
Vous le reconnaissez: la même couleur de verrue!
A votre mépris, Nain difforme sautant de l'un à l'autre
Un petit Nain d'étoiles, identique,
Magnifique coursier, le plus beau des anges,
C'est mon mépris qui répond.

lundi 24 octobre 2011

Je suis rugueux, hirsute, immonde? Eh bien vu ce qu'on appelle la propreté j'en suis fier, savez-vous.

J'appelle à l'aide

Les gens en place sont immondes. Le vivant est laid. Peut-être une chose qui aurait lu (?) et compris (????) mes précédents messages comprendrait que je ne dis cela que parce que je ne suis ni en place, ni vivant. Ou, si je suis vivant, je me répugne à moi-même; et voici en quelle mesure je suis vivant.
  Le fou de Gogol dans le journal disait que la langue des gens était généralement habitée par un ver minuscule qui prêchait l'Islam. Il n'était pas si loin de la vérité vraie.
  Bien sûr, ce n'est pas forcément l'Islam qu'il prêche, ce peut être n'importe quelle religion, y compris l'athéisme, la science, la démocratie, et la Raison. Voilà ce que pour ma part j'ai découvert quant à sa nature:
Il y a en moi une chose minuscule qui, alors que le Roi a abdiqué depuis longtemps, s'obstine à faire tressaillir ma chair pourrie, et se mouvoir le reste; il passe son temps à observer tout autour la vraie vie vivante qui dégouline, pour essayer désespérément de l'imiter, pour parfaire sa mimétique de cadavre; et il a un besoin de plus en plus pressant de vrai vivant, de pensées nerveuses; de passer outre ce fantôme hideux qui veut l'exclusivité du trafic entre les êtres... Cette nappe de brouillard inconsistante... ou peut-être celui-ci veut-il seulement protéger les autres de mes dents de carnassier?Quoi qu'il en soit, je le repousse et c'est l'alliance de très mauvaise foi avec lui qui m'a fait insulter Hitface, qui me le fait redouter, en plus de ce que c'est un sanguinaire.
Est-ce un sanguinaire? Je ne sais; j'ai vraiment cru voir, à la recherche désespérée de pensées, d'exotisme, quelques horribles choses qui au contact immonde de mon regard se sont hérissées d'un dédain sanglant; ou de peur; ou de haine?... J'ai douté de tout ou presque, j'ai douté de la stupidité de tout le monde et cela a affermi le sentiment de ma propre stupidité... Un simple coup d'épingle et j'éclate. Si quelqu'un veut bien se donner la peine, ici dans ce qu'on appelle la blogosphère, sans que j'aie à aller les insulter chez eux sans m'en rendre compte, en croyant leur faire plaisir; ou alors qu'ils viennent se venger, qu'ils viennent jusqu'ici pour me tuer s'ils en ont le courage, ou seulement s'ils estiment que j'en vaux la peine (mais tout de même, un coup d'épingle, ce n'est pas grand-chose, pas un grand effort) ce sera toujours plus agréable et poli que de prendre ce coup d'épingle de la part du silence et de la solitude... Ce sont de vieux amis. Ils me regretteront mais leur main ne tremblera pas.

Pleurer sur un stylo, parce que oui, parce que franchement oui, ouvrir deux veines parallèlles pour que le sang gicle bien haut c’est de la triche, c’est deux étraves toutes pleines de buée toitureuses (ça veut dire relatif à la toiture pour les ignorants qui des fois ne connaîtraient pas ce terme). Langue étroite, langue canal, langue manche... Rien ; oui, et alors ? Que vaut-il le mieux ? Monter ou faire du chemin ? Vous vous êtes focalisé sur un point mort de mon anatomie pour me mépriser, mais je l’ai fait exprès, car c’était un piège et vous êtes tombé dedans. Ce, avant que vous puissiez en sortir il vous faudra en dépenser, de la salive inutile. Je ricane et je vomis sur votre sale mépris jaune et complaisant, car pendant que vous perfidez en cadence en vous admirant la langue et la cervelle, moi je ricane ! Je chante et vous ne l’entendez même pas, persuadés que je ne peux pas chanter et que ma langue est jaune comme la vôtre, et même, justement bien plus jaune que la vôtre ! Sinon cela, vous ne voudriez pas rester dans cet état avec cette complaisance ; vous ne voudriez même pas partager ma boue, mon auge. Il vous faut votre propre paillasse dégueulasse. Vous accepterez une poubelle tant que vous savez que je ne m’y trouve pas. Je suis la pire des ordures. Mais je ricane sur vous.
Rimbaud n’est pas un défaut, c’est juste un brillant mauvais élève : la plus belle chose qui soit au monde ; ce sans quoi rien n’avance que de façon horizontale. Vous êtes des rampants ; je ne dis pas que c’est un défaut, remarquez. Je ne le pense que par dépit.

 HOW I HATE THOSE GOODY-GOODIES !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

 Cordialement La futaie fantôme

samedi 8 octobre 2011

Erratum (suite)

Non, moi je suis côtoyé et environné par un Nain; où que j'aille, il m'a précédé d'une seconde et il est capable de me dire quelque chose à propos de tout ce qui m'entoure soudain; toutes ces formes inconsistantes dont l'habitude de ma propre image, plus qu'autre chose, a fait mes semblables. Plus je m'approche, plus il peut m'en dire. Il est une vigie; il est même vigie au point d'éclipser le capitaine, que je suis. C'est sur ses seules indications que je manoeuvre le lourd gouvernail; ce qui fait de cette liberté gigantesque que j'ai de disposer de celui-ci, la simple et inutile liberté d'exécuter ce qu'on me conseille avec une acuité que je ne peux pas avoir.
Comme il m'introduit, pour ainsi dire, auprès des autres, que moi-même je distingue à peine, c'est aussi lui qui me présente et qui, même, parle en mon nom. Il adresse aux autres les mots que j'ai choisis et qu'il m'a conseillés à voix très basse, avec mille précautions destinées à me confirmer combien je ne serais jamais capable, moi, minuscule particule de néant, différete du reste parec qu'elle prétend qu'elle pense, de me présenter à d'autres, qui sont probablement comme moi, aussi faibles, informes et sans visage, et de communiquer d'une manière ou d'une autre... Autant mettre deux miroirs face à face dans l'obscurité. Ou deux boîtes vides.
IL va donc de soi que mon Nain rend le même service à ces autres; de la même façon; que donc il n'est pas "mon" serviteur, pas tant "mon" serviteur qu'un concept de serviteur que chacun s'approprie et qui n'est à personne, qui n'accomplit tout cela, sans qu'on puisse même le détacher de notre personne -sans donc qu'on puisse lui témoigner aucune forme de gratitude- que parce qu'il n'a pas de volonté propre, contrairement à nous; ce qui nous le fait dominer avec beaucoup d'orgueil; ou s'il en a, il l'utilise en une extrême complaisance, à mon égard, à l'égard de tous.

Erratum

Le rédacteur d'hier s'est pendu. Auparavant il a laissé ceci:
Mon labyrinthe continue de s'accumuler et de dissimuler ma vacuité comme des vêtements couvrent les corps nus et tous identiques. Qui s'occupe des petites arêtes osseuses? Qui remarque, sans cheveux, sans visages, sans odeur (puisque tout ceci fait en quelque sorte partie des vêtements), sans mètres et sans miroir, qui est son parent ou son ami? Or, là-dedans, dans les enveloppes de cire, se trouvent des coeurs tous pareils, des foies tous pareils, des intestins tous pareils, des cerveaux qui se ressemblent tous, qui ne sont uniques que parce qu'ils ne communiquent pas les uns avec les autres.
Je ne comprends plus l'extrémisme d'André Breton. Pourquoi déteste-t-il à ce point les situations romanesques? Certes, on nous y impose une personne avec noms, apparences et pensées, et des lieux de même, mais après tout que ne nous est-il pas imposé? Breton n'est seulement pas chrétien; c'est-à-dire qu'il a refusé autant que possible d'être guidé par un pantocrator (c'est-à-dire un auteur réaliste), ou qu'il l'a conceptualisé autant qu'il était possible; dé-figuré. Mais dans ce cas toute situation d'énonciation est à bannir. Toute parole, au sens large.
Même l'état d'esprit DADA. Pleurez à l'émergence des Lampes Statues! On y a droit! Elles sont là pour nous, puisquenous sommes des spectateurs, que seuls des spectateurs peuvent les voir: montrez les plus belles oeuvres d'art au néant et alors vraiment à quoi bon? Je veux bien croire que ce ne soit pas différent de montrer cela à des assistants, mais alors il vous faut, pour me convaincre, cesser tout à fait de créer - de parler-, et vivre comme un animal guidé par le seul et unique besoin.

vendredi 7 octobre 2011

Je plaidoirai!

Oui! Et je dirai encore bien d'autres méchancetés, histoire de peut-être capter l'attention de mes ennemis dont la tête se cache au plus haut des cieux, oh! je préfère être haï que méprisé. Mais non, ce n'est pas la même chose. Dans la haine il y a énormément de respect. Je peux dire des ignominies, non vous ne m'en croyez pas capable, vous allez voir, un jour je saurai faire quelque chose qui vous retournera.
Le mépris aussi déplace des montagnes. Mais il emploie bien plus d'efforts à ignorer ce qui est son objet qu'à déplacer des montagnes. La haine, elle, détruit. C'est à cela que s'emploie sa puissance. Et le butin est considérable, alors que le mépris revient à tourner sur soi-même pour ne pas voir; et cela est un effort presque égal, comme j'ai dit.

Ho déserteurs!

Observez une voiture s'ébattre d'une façon galeuse: rien n'est plus ridicule et grotesque. Et la personne momifiée dans sa ceinture qui se trouve à l'intérieur et qui a priori ne bouge pas du tout! Puis considérez quelque chose comme une étude quelle qu'elle soit, et considérez qu'on a tué en vous tout intérêt pour l'étude scolaire en vous faisant lire un Rougon-Macquart en troisième.
Considérez combien un Raymond Queneau a destructuré et rendu inutile, laid, méprisable le commentaire de texte quand vous avez lu ce petit joueur quand vous étiez en première. Oui, vous passez vite les vitesses et vous voilà au-delà de celle de la lumière, ou plutôt non, et même, celle la plus haute que peut atteindre ce véhicule idiot et nécessaire qu'on appelle éducation endort plus qu'elle ne transporte, vieille fusée poussive vers des planètes déjà conquises et perdues entre-temps.
Deux rédacteurs successifs ont démissionnné ces temps-ci. Mais pour ce qu'on a à en faire. Au contraire, c'est parfait si personne ne voit l'étendue des dégâts. Il n'y a pas de dégât s'il n'y a plus de vie nulle part. Mettez-vous en tête qu'un univers exactement semblable à celui que vous êtes vient de disparaître par une faute qui pourrait être la vôtre s'il s'avérait que, comme il semble, vous êtes les autres.
Il y a des coulées de plastique de toutes parts, mais qui ça intéresse? Non, on ne regarde que sa seule propre image démultipliée potentiellement à l'infini, on se délecte de cette apparition que, parce qu'on n'a jamais vu quelque chose de divin, on estime divine! Ses propres entrailles dans le miroir! Et indifférent à qui bougeait et provoquait d'imperceptibles remous! Non, tout ce qu'on voit de moi c'est mon désordre, on ne voit pas mon précieux labyrinthe qui pourtant est la même entité, strictement. Je veux bien qu'on ne croie pas à mon existence, je veux bien voir s'écouler lentement, à fleuves tranquilles ma bile infâme; je veux bien que l'on admette que quelque chose cloche irrémédiablement et que vous le méprisez, mais que ce soit moi, en toute sincérité, je ne le peux accepter, naturellement. Il n'y a rien de prétentieux ici, ou s'il y a de la prétention elle est sincère et nécessaire et toute "modestie" pourrait n'être à ce niveau qu'hypocrisie qui serait, excusez du terme, pire.

mardi 13 septembre 2011

Deux interludes

Do not read this if you understand English. This is defenetly not in English. If you do, you will laugh at me. If you don't, I will laugh at you!
1: the crying sailorduck
I offered her art cereals, the sometimes ones in the whole sea
The ocean, dark brother deep hole water,
Drown deep into her smilin'celibate red eye, mocked in her huggin'sharked face, laughing at me:
Poor sailorduck!
Quacking at her as her father,
Diving, drunking in her glass of salt and grass
Pickin'up her teeth, her bites, loss an'all above the whitin'frozen glass.
She gave her skin to me, an'all these barking teeth, and these ugly guts;
While I was sad a mile away from her, as well as it work awake
Gave it all away from me, to me when I was different,
When I thought I was worse, when I wished I was now
Quacking at her in darkness, quacking to myself, quacking for nothing.

2: Waterface
I'd better dream water skeletons,
And plenty of Gods.
And blah blah.
Nouilles





jeudi 4 août 2011

Affiches de films

The Selfish Shellfish : Sortie spécial vacances à la mer: après avoir vu ce film, plus jamais vous n'y irez.

 La curieuse solution à un problème tombé du ciel.
Mystérieuse affaire de noyade dans un verre de cocktail.

Pour la sortie en salle, n'y comptez pas trop: le tournage est maudit par Yog-Sothoth de sorte qu'il s'y passe des choses bien plus cauchemardesques que dans les films eux-mêmes et le réalisateur est au désespoir à cause de cela.

mardi 2 août 2011

Dans tout cet entourage où tout cherche à nous faire rechercher le meilleur pour nous-mêmes, la porte est grande ouverte à des regrets vains et même inutiles, et ce, en une quantité gargantuesque; quel triste festin, où on n'est pas sûrs que ce soient nous les convives et eux, la nourriture.

samedi 23 juillet 2011

Parlons

A: Où est le beurre?
B: Ici.
A: Mais où est ce fichu beurre?
B: Ici!
C: Je déteste le beurre. (à A) Toi aussi.
A: C'est pourtant vrai, pourquoi je le cherche?
B: Pour moi! pour moi!
C: Pour lui faire la peau.Tu vas jeter toute cette graisse avariée à la poubelle.
B: Non!
A: J'ai l'impression que je dois répondre à la fois "oui" et "si".
B: Non!
A: Si.
C à A: Tu peux te contenter de dire "oui".
A: Oui.
C: Elle est bien bonne!
A: Ah, voilà le beurre.
B à A: Rends-le moi! (à C) Il me l'a arraché des mains.
A: En enfer, le beurre! (Il le jette)
B: Non! Non!...
A: Aux mouches.
C: Aux mouches! C'est cadeau. Rien à payer.
B: B... B... B... Bzzzzzzz! Zzzzzzzzz... Zzzzz... Zz... Zz... Z.
FIN

samedi 2 juillet 2011

Nous n'avons jamais sous-estimé le sommeil, tout ce qu'il impliquait et qui devait nous rester incompréhensible quoique vainement recouvert par les siècles de termes très savants; ce, d'une part, et d'autre part nous avons toujours su l'effet curieux qu'avaient un nom, un état civil, bref une existence sur une personne qui était pour ainsi dire faite pour les obtenir et ne les obtenait pourtant pas.
   Un matin, quelqu'un du nom de Charles B. Tackin se leva, très endolori, très faible sans aucune raison appparente, mais lourd de l'impression puissante d'avoir été blessé. Plus tard il découvrit sur ses épaules deux petites plaies anciennes, grises et froides dans le miroir; il passa un moment d'incompréhension tirée du lit à les considérer, à les toucher, à s'interroger sur leur provenance; au contact de ses doigts malhabiles les croûtes s'effilochaient en forme de petites pattes d'araignée rougeâtres.
"Au fond, se dit-il un peu plus tard, un peu plus réveillé mais loin encore, il le savait, de l'être autant qu'il fallait, au fond j'ai toujours eu quelque chose de grave sur la conscience."

mardi 21 juin 2011

Hitface si vous avez le temps

"Mon enfance?... D'où je viens?... (Et d'une mine gênée imprimée sur la toile de tente militaire et grossière qui te sert de visage: comment lui dire sans heurter sa sensibilité?)... J'avais une marraine autrefois; une sorcière. Penchée sur mon berceau. Mais elle n'avait aucune bonne intention me concernant. Une nuit, je l'ai vue, toute proche, dans l'angle de la pièce obscure, drapée dans sa pose de momie; je l'ai vue se diviser; sous mes yeux! Comme une grosse cellule, comme une maladie trop petite pour être vue! Je les ai vues se disputer pour savoir laquelle resterait une marraine et laquelle prendrait ma place dans la délicieuse insouciance de mes jeunes années... Evidemment; elle ne pouvait qu'être d'accord avec elle-même, tu comprends, et j'allais y passer... déjà ma marraine, devenue minuscule, devenue un autre moi-même, rampait vers moi et escaladait mes barreaux en gémissant, rouge de fièvre... Je me suis battu avec toute la hargne désespérée du malade, du condamné... oui, du mourant. Toute la nuit, je me suis battu, ou c'est ce qu'il m'a semblé car ça m'a été horriblement pénible. Je me suis entendu pousser un gémissement de triomphe que je ne me suis plus jamais entendu pousser depuis. Parce que j'ai grandi, j'ai survécu, oui. J'étais seul au matin et on m'a donné mes médicaments, et la douleur est provisoirement partie comme tous les jours, mais non je ne saurais dire lequel des deux mois a tué et dévoré l'autre cette nuit-là. Avec le recul, ce n'est pas très important."

SILLY

Morshu loves Europe! United Europe forever!

lundi 16 mai 2011

D'un à un autre

Sommes-nous seuls dans l'univers? Non: vous avez 8 milliards de voisins.
Regards serpents, regards vers, regards tout ce qui marche sans pattes, ponts sans piles qui, si loin qu'ils portent, ne brisent pas, parce qu'ils ne portent pas.
Veux-tu un vrai bon pont, qui te conduise où tu veux, il te faut non ce qu'on nomme ordinairement un pont, soit planche de bois, soit arches robustes, mais piles si resserrées que c'est en fait un rempart, un aqueduc plein et que rien ne peut prendre d'assaut ou détruire. Car il te faut un vrai mur; pas seulement un rempart (qui est pour ainsi dire fait pour être assailli et détruit): un mur qui, de fondations enfouies infiniment dans les profondeurs du sol, s'élève surtout dans l'infini du ciel, et de l'espace; avec autant que possible à mi-chemin, un couloir aveugle, c'est-à-dire parfait, et lisse, sans nuance ni pente ni marches, sans aucune brèche ni même le plus infime pore, rien qui puisse détourner de la lumière vers où tend ensuite avec désespoir tout l'édifice, car on craint que cette lumière soit très faible, on le suppose même (pourquoi, sinon, prendre tant de précautions?) mais sans l'admettre, ce qui serait inhumain ou, du moins, barbare, indigne de soi.
   Les plans sont là; tout est là, tout attend tes ordres: tout a été fait sur ton ordre timide et surtout ignorant. J'en suis l'architecte autant que je suis ouvrier, soldat, ambassadeur et toi-même, petit prince écrasé dans ta citadelle dont ne sachant rien, tu veux t'évader.
  Sur cette  voie, meilleure que les voies romaines, enfin, passe le cortège interminable et somptueux de l'ambassade. De même que la construction d'un tel édifice a pu durer mille ans, pendant lesquels on s'est abstenus de toute autre tentative d'approche (d'autres lueurs, dans d'autres directions opposées), où on a craint à chaque instant de voir disparaître, lassée ou indignée, la faible lumière qui a tout guidé depuis l'origine, de même il y a bien mille ambassadeurs, et ce sans compter leurs familles, leurs préposés, leurs serviteurs, leurs millions d'esclaves; sans compter encore l'escorte, une armée de milliers et de milliers d'hommes dévoués, et l'interminable file des chariots du ravitaillement, qui place là une touche nécessaire de pagaille, et le bétail qui suit en rangs serrés.
   Il y a un ambassadeur, pratiquement un cortège déterminé pour chacune des situations auxquelles on a pu s'attendre, chaque disposition qu'on a pu imaginer quant à comment on serait reçus. Car, il est vrai que de ce côté-là règne l'ignorance la plus complète. On s'apprête à présenter ses hommages les plus distingués à un être d'une autre dimension; c'est pourquoi ces hommages ne peuvent, n'ont aucune chance d'être compris, du moins comme le comprendrait celui qui les présente s'il arrivait (mais ce serait improbable) qu'on les lui présente tels quels, sans avoir besoin de les traduire. L'ambassade entière se serait plus tôt trompée de chemin, aurait plus tôt fait demi-tour sans s'en apercevoir dans le couloir étroit et parfaitement rectiligne, que ne serait arrivée de l'étranger, et sous cette forme, et si bien comprise, la plus haute idée qu'on se fait du mot "hommage", ou même une idée quelconque.
   Aussi chaque pas s'alourdit d'une angoisse: comment sera-t-on reçus? Sera-t-on seulement reçus ou, si nous sommes reçus, le comprendrons-nous? Ou resterons-nous stupides, timides, prudents, au risque d'offenser l'étranger dans sa langue de silence? Il est vrai que, par temps clair, il semble à certains -c'est une rumeur qui circule; moi je ne vois rien- que des travaux semblables aux nôtres ont été commencés dans notre direction, comme pour former avec nous une jonction... On prétend cela en prenant prétexte que les travaux avancent étonnamment vite, que la minuscule tache noire et rouge au milieu de l'horizon, qui constitue notre but, grossit rapidement; que déjà on distingue des flammes, des braseros de postes de garde, des drapeaux, des signaux. Je n'aime pas ces raisonnements: soit nous nous approchons plus vite que prévu, ce qui est excellent, ce qui insinue lentement l'espoir que nous ne mourrons pas en chemin, soit c'est à force de regarder avidement par là, sur ce point, qui lentement le fait paraître moins minuscule de jour en jour, alors que s'il grandit (ce qui est presque sûr), cet essor est imperceptible. J'ignore pourquoi, mais je préfère encore penser cela, qui est triste, plutôt que d'envisager qu'ils aient entrepris, en face, un mur pour nous rejoindre, que ce soit pour nous imiter, dans un élan de bonne volonté internationale, ou qu'ils aient commencé avant nous; qu'ils soient en somme, possiblement, des êtres comme nous, bipèdes, travaillant de leurs mains, curieux de nous comme nous le sommes d'eux, avides de nous rejoindre et capables à ces fins de déployer les mêmes efforts, trésors d'ingénierie et d'architecture, délégations dorées, triomphes de rhétorique: je préfère encore imaginer qu'ils sont difformes, incolores, sans membres, que même, s'ils avancent c'est pour nous envahir, que même ils en seront capables et raseront pierre par pierre notre magnifique civilisation. Je suis même prêt à envisager la leur comme plus magnifique, assez pour ne pas vouloir s'encombrer du moindre d'entre nous même comme esclave. Ce qui serait insulte à leur perfection étrange d'étrangers. Et pourtant ceci est vain, et je crois bien savoir en moi comme, par force ou par faiblesse, je ne peux ou ne dois les supposer que pareils à moi, à nous. Que leur différence ne fait pas obstacle et qu'au fond ils comprendront nos hommages, ne serait-ce qu'avec indulgence.
   A mesure que les travaux avancent, l'inquiétude grandit. Sans doute, s'ils ne nous sont pas supérieurs, ne sont-ce que des barbares qui nous massacreront ou qui fuiront à notre vue. Ou alors, ce ne sera rien et j'ai tort de désigner par "ils" ce qui n'est peut-être qu'un reflet du crépuscule sur une roche. Et nous aurons fait tout ce chemin pour rien. Tout autour, de semblables lumières clignotent : d'autres cités, d'autres Mois obscurs qui nous appellent ou, plus probablement, nous ignorent? La plus lointaine de ces innombrables étoiles dans la nuit n'est-elle pas plus proche de nos agitations idiotes que l'ingrat caillou vers lequel nous rampons et nous avilissons? Je me dis; nous nous disons, et par à-coups, nous en sommes persuadés et le désespoir nous frappe en plein visage, et le mur se déconstruit, et le point à l'horizon recule, et nous mourons. Mais je sais bien que ce n'est qu'une nouvelle illusion d'optique, ou lassitude, ou mauvaise qualité du repas du soir; fatigue, en bref : faiblesse. Nous nous disons alors, en cercle, qu'il faut absolument suivre à la lettre, quelle que soit sa destination, la trajectoire du tunnel; sans quoi les architectes, qui n'ont jamais mis les pieds dans cette région, se retourneront dans leurs tombes; et nous rions. Et nos existences auront été vaines. Et nous savons que, même s'il était impossible que nous arrivions (on ne l'affirme pas, pour ne pas mourir), du moins nous aurons fait tout ce qu'il fallait; nous serons allés incomparablement plus en avant que tous ces milliers qui nous observent d'en bas avec une admiration ironique, qui font cent fois par jour l'aller-retour qu'en mille générations nous n'arrivons pas à accomplir, qui vont là-bas, vendre leurs fruits et leur pétrole, et effleurent à peine de l'oeil l'Autre au loin, inconsciemment terrifiés. Nous, quand nous arriverons, toutes les portes les plus profondes te seront ouvertes en grandes pompes, et du plus au fond de ta citadelle, Prince, tu sauras tout.

mercredi 4 mai 2011

Cherche dans ta mémoire, qui anticipe autant qu'elle est issue des cendres du passé, jusqu'où tu pourras aller sans ambition: nulle part. Et avec de l'ambition, pour ne pas te décevoir tu inventeras, tu te donneras l'illusion que tu es arrivé quelque part, que tes efforts n'ont pas été vains, alors que peut-être tu n'es même pas parti.

mardi 12 avril 2011

Autres généralités sur la route

1. je n'ai encore fait qu'une dizaine de pas laborieux sur la route. Ou plutôt, cinq ont été laborieux et m'ont donné l'impression, à chacun d'eux, que l'effort mis à les accomplir (qui m'a semblé incroyable) me permettait, au pas suivant, de sauter avec légèreté un ou deux mètres plus loin. Ce sont ces idioties, ces frivolités qui me font, au fond, le plus et le mieux avancer; qui me font m'envoler loin au-dessus des ronces et des crevasses, des vilennies de la route; qui me donnent l'illusion, du moins, de les avoir franchies, car il est vrai que fatalement, intact de leurs épines et des arêtes tranchantes des roches, je ne les ai vues que de haut, et couvertes par la brume: autant dire que je ne les ai pas vues, que je ne peux pas jurer qu'elles existent ou qu'elles sont du moins si terribles. J'ai imaginé que sur la terre ferme il y avait de tels obstacles pour justifier le fait que je sautille au lieu de marcher comme tout le monde, ou de prendre le bus; mais par ce moyen je vais plus vite qu'à pied, déjà; plus vite qu'en bus ou en métro, ou en avion. Mais on ne justifie jamais suffisamment ce genre de comportements.

2. Lui, marche encore allégrement, sourd encore aux craquements, aux menaces qui grincent dans la fragile mâture de ses jambes; sourd aux menaces infinies du dehors; il n'entend encore rien que le chant des oiseaux, même si la saison est finie; que, même s'il n'est pas loin (car il s'est reposé en route), il est déjà ailleurs. Quoi qu'il en soit, il sourit allégrement, plein de confiance en un avenir très triste et très inquiétant qui est sa raison d'être même.
   Il s'arrête sur le chemin, surpris, pour contempler un vieillard assis sur le côté, immobile, la bouche hagarde, les yeux ternes. Et tandis qu'il s'attarde, qu'il regarde au fond de ces yeux aveugles, il lui semble que la nappe de brouillard qui y est tapie n'est pas tant dans ces yeux que dans les siens à lui, collée à sa propre rétine; il se frotte les yeux, troublé. Mais quand il les rouvre, ceux du vieillard sont restés aveugles et continuent à le fixer avec insistance: rien, contre toute attente, ne semble avoir bougé. "Il y a une différence essentielle entre ceux qui marchent et ceux qui voient, dit l'homme d'une voix lente. Que vois-tu en avant, qui fait que tu t'y rends? Moi, je ne vois qu'une terre brûlée, un paysage lunaire, qui ne m'engage pas. Je pourrais, pourtant, et peut-être je devrais marcher. Mais rien ne m'y poussera. Je reste assis ici où il reste un peu d'herbe pour me faire un lit mortuaire." Confus, l'autre passe son chemin avec ironie et continue sa route vers les pommiers et les stations thermales; mais plus il avance et plus sa vue baisse, et plus l'horizon se couvre d'une nappe de brume rouge noirâtre.

dimanche 27 mars 2011

Evidences sur la montée

Quitter l’idée devenue fausse qu’on part au bon moment. On aura toujours l’impression de partir d’une façon importune, de ne pas avoir besoin ni la moindre envie de partir, de quitter le peu que l’on connaît et que l’on a. C’est alors non pas avoir plus sûrement raison ; c’est être devenu vieux. Être devenu d’autant plus vieux qu’on l’est devenu bien avant l’âge qu’on s’imaginait. Autrement, avant cela,dans la jeunesse, on aura désormais toujours l’impression de partir au bon moment. D’avoir fait le bon choix ou à la rigueur d’avoir été bien servi par le hasard. Et c’est alors que, sous aucune contrainte, pour aucun prétexte qui soit assumé, reconnu comme quelque chose d’inévitable, on avance le plus vite ; sans avoir donc à faire le moindre cas de l’énergie dépensée ; de son énormité effrayante par rapport au rien du tout effrayant de l’avancée (bien qu’on avance certainement plus vite, par rapport aux gens vieux, ou cela n’est possiblement, qu’une illusion d’optique) ; une énormité qu’alors on ne peut pas voir, depuis tout en bas sur la route elle-même, au bas, à la racine de la côte. Plus tard, bien plus tard (et pourtant un petit nombre d’années après), quand on est devenu vieux, c’est-à-dire soit fatigué de ne voir jamais rien au bout de l’horizon, soit qu’on se soit pour ainsi dire cassé les dents sur une colline, sur une élévation rocheuse de la route, rocheuse, sur laquelle on s’écorche, on se brise les os devenus frêles et presque transparents, alors, à ce moment, à ce moment l’on voit de haut la route, non pas au loin ce que la brume cache encore et continuera de cacher, comme une consolation bien après qu’on soit disparus, autant dire pour toujours, alors dis-je, l’on voit derrière soi le minuscule bout de chemin parcouru ; il paraît démesuré par le fait de la distance, de la hauteur (parce que, devant, la pente continue de monter vers l’infini) mais en vérité l’on voit très bien de ses yeux qui faiblissent, qui jaunissent, l’on voit très bien encore la ville qu’on a quittée depuis longtemps, ses toits en pente, ses murs en bois familiers et nostalgiques ; dont même les lumières n’arrivent pas à démentir l’impression qu’elle est abandonnée. Devant ces vestiges, avançant vers soi avec peine, avec lenteur, chantant d’allégresse pour se donner du courage et pour jouir en chemin (l’écho se répercute de partout dans le désert), ceux que, bien qu’ils ne soient pas jeunes, on appelle les jeunes avec l’amertume de ce qu’ils sont devant parce qu’ils sont plus jeunes que soi ; ils peinent visiblement ; ils peinent et ils chantent, ils jouissent ; ils jouissent véritablement de l’effort. L’effort que soi, vampirisé par celui-ci, on ne peut plus goûter du tout. On se dit avec mesquinerie, qu’ils sont loin, qu’ils n’arriveront jamais là où l’on est, momifié d’attente, à ce train-là, qu’ils n’arriveront jamais à ce niveau, qu’on trouve alors orgueil à avoir atteint (même si on peut se dire qu’objectivement ce n’est rien ; ce qui est inutile) ; que du moins s’ils arrivent un jour, ce qui reste hautement improbable, ce ne sera que dans le même état dépenaillé, lamentable, rendu aussi amer, aussi peu charitable que soi.

samedi 19 février 2011

Classe de style

Ils font un exercice de "style", ou de sens plus probablement, je ne sais, auquel je ne comprends rien et ne comprendrai jamais rien; ils le font sous prétexte qu'"après le grands parti, ce qui remporte le plus de voix est le petit parti: les royalistes."Il s'agissait de prendre des extraits de textes littéraires et d'y remplacer tous les sujets par "quelque chose de royal"; ou seulement un des sujets, le plus important. Je ne saurais si à présent, après coup, après les avoir longtemps entendus discuter à ce sujet, j'en suis moi-même capable. Essayons:
  "Cet ancien commis-voyageur, à la tête d'un théâtre en faveur, trompait sa commandite, il la considérait comme une femme légitime." (Balzac)
  "Cet ancien dauphin, parvenu au trône d'un Etat riche et prospère, trompait son peuple, il le considérait comme sa propre reine légitime."
  Décidément cet exercice est bien impossible; et bien inintéressant aussi mais peut-être que je dis cela par dépit, car la bonté avec laquelle ils m'accueillent ressemble trop alors à une simple et perfide charité.

lundi 7 février 2011

Les bagages

C'est ça, ouvrir un jour d'une main faussement assurée, souhaitant être assurée, une valise d'une hauteur, d'un volume qui laisseraient supposer quelque chose d'énorme, et qu'on ne peut pas soulever à cause de sa masse -ou de la seule impression qu'elle dégage, après tout-; et en extraire sans difficulté un minuscule coton-tige, ou quelque chose d'autre, qui peut d'ailleurs être ou du moins paraître sur le moment extrêmement utile mais, par sa solitude ricanante et fossile dans l'immensité grotesque de la valise, répugne et  livre aussitôt à un désespoir très subit, très poussiéreux. Ce n'est d'ailleurs peut-être qu'une impression passagère. Il n'empêche qu'elle existe et sa présence, puis son invincible souvenir, invincible par sa singularité dans le meilleur des cas, continueront de peser; c'est ainsi de partir en ayant tout et de sentir tout à coup que jamais on ne partira.

vendredi 28 janvier 2011

Passez par la porte

Les portes; elles sont en quelques circonstances des ouvertures et, la plupart du temps, ce ne sont que des murs bêtes et simples. Et il me faut croire que ce sont des ouvertures, que, si je le voulais, elles pourraient toujours l'être, qu'elles ne le sont pas toujours uniquement pour me protéger des ennemis et des épidémies.
   Toi, dont le loisir est de condamner les portes par des bandes de plastique: pour qui te prends-tu? Pour qui se prendre? Pour qui voulez-vous que tu te prennes? Croit-il donc qu'il possède chez lui la vérité, la seule ouverture donnant sur le vrai jardin, ou la vraie rue, ou même la vraie mort? Et même si tel était le cas, on pourrait lui dire: bravo, félicitations, et s'en tenir là car il y en a beaucoup d'autres, beaucoup trop pour qu'il soit possible de toutes les essayer; beaucoup trop pour qu'aucune ne donne sur quelque chose d'appréciable; voire même de supérieur à la prétendue découverte de l'insolent. Qu'on en trouve une sans plus tarder, qu'on trouve tout de suite une perle du genre, et la plus rare possible, pour pouvoir dire au stupide petit prétentieux: "Ah, je déteste les fanatiques dans ton genre!" Autrement, avant une telle découverte, il est tout aussi possible et vrai de lui dire la même chose, mais ce passera trop évidemment pour de la jalousie.
   Le pire est quand même d'ouvrir une porte au hasard, même si elle ouvrait sur les plus hauts niveaux de la sagesse; et cela je ne le dis que par dépit peut-être, sans pouvoir plus rien atteindre que ce qui se présente devant moi, de quelque côté que je me tourne; tout comparable, passable, ne serait-ce que parce que je l'ai sous les yeux; quoi même qu'après une seule de ces portes en nombre infini, il se trouve encore une infinité de portes; une autre infinité, bien distincte; et que peut-être il en est ainsi tout le long -mais si l'on se fixait pour objectif de tout franchir, alors on ne verrait plus les merveilles que l'on traverse; l'espace, qui est quand même un espace, qui peut être extrêmement vaste, qui sépare deux portes. Et alors on ne verrait plus que celles-ci. Evidemment, on ne voit plus non plus alors passer l'infini des steppes pleines d'accidents de terrain, on ne voit plus ses pieds saigner et pourrir ni ses cheveux toomber ni son nez se creuser ni sa tête se vider du peu qu'elle contient; on sent par contre certainement le désespoir prendre la place qu'occupaient autrefois en proportions variées la connerie et le fol espoir.

mercredi 26 janvier 2011

Il y a du bruit dans la pièce d'à côté, du bruit très massif, très encombrant; et pourtant, si je me hasarde à briser l'instable silence que je me garde jalousement dans cette pièce pour moi-même, si je le brise moi-même, et pour une chose aussi absurde que réclamer le silence, alors le bruit, laissé en suspens dans l'espace devenu dix fois plus vaste, semble redoubler; il ne me laisse plus que le mordant désir de fermer la porte, en la claquant même avec sauvagerie; désir d'autant plus mordant que de porte, il n'y en a pas!

dimanche 23 janvier 2011

Rectificatif

Je ne sais si cela sera lu; ou peut-être que je suppose que ce ne le sera pas, à défaut je l'espère et j'aimerais mieux que cela ne le soit pas, mais qu'il en reste encore la possibilité dans l'infini, que ce soit lu, qu'un jour, par un hasard extravagant. Bref, quelque chose devait être tiré au clair. Il a été cru par certains qui peut-être le croient encore, et je ne peux rien faire pour le démentir, que Monsieur et moi-même étaient la même personne. Sans contredit, s'il y a parmi nous deux au moins un qui n'existe pas, c'est sans doute moi-même. Je me suis dit un jour, un matin, mais c'était la fin d'un vaste débat, que vraiment je n'étais personne; que ce que du moins l'on voyait de moi oh! peu de chose, était infiniment plus suffisant que je ne l'imaginais. Peut-être est-ce le cas pour bien des gens. Disons, si l'on aime les métaphores un peu grandiloquentes, que je suis resté à l'état de chose en puissance; que je n'existe du moins pas encore et que cela ne se décidera jamais à se commencer; peut-être dans l'optique où cela ne pourra jamais être terminé. Actuellement, je suis donc immortel comme les acariens; potentiellement immortel comme le néant. J'aimerais être une mouche, ou plutôt j'aimerais être les mouches. Comme on dit, les squelettes sont légers. Aussi toutes mes excuses pour ce malentendu même s'il peut n'avoir eu aucune incidence sur la marche du monde, comme le suicide d'une souris, et vous prie d'agréer, toutes les personnes, l'expression sincère de la sincérité avec laquelle j'ai l'honneur d'être encore votre très humble et dévoué serviteur.

mardi 18 janvier 2011

La salle obscure

Il devait être très tard, j'étais seul dans le bâtiment immense, labyrinthe livré aux ténèbres de la nuit, lorsque je sortis d'une salle obscure. Quoique le terme de "salle obscure" soit pourtant un peu abusif, car la salle était ouverte, par deux portes, sur le couloir qu'emplit toujours, surtout à cette heure, une puissante lumière électrique.
   Comme je sortais, je vis, sortant par l'autre porte, à vingt pas de moi, une personne. Elle me demanda d'un ton offusqué, presque choqué, ce que je faisais dans cette salle obscure, à cette heure. Bien sûr, je ne pouvais pas lui répondre. J'ignorais même pourquoi cette personne elle-même avait été dans cette salle, toute proche de moi, plus proche de  moi que toute autre chose, et invisible cependant. Tout ce que je pus répondre fut ce que je n'avais pas remarqué sa présence, à cause de l'obscurité sans doute; conséquemment je m'excusai et la personne disparut après m'avoir adressé un regard satisfait plein de reproche et de défiance comme pour me prouver qu'elle n'avait pas peur, ni du noir, ni de moi-même.

mardi 4 janvier 2011

Portrait d'un ver

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Le ver est un ami admirable: même s'il est votre ami, ou même si vous ne voulez pas qu'il le soit, il vous sera toujours redevable de quelque chose que vous n'aurez pas forcément l'impression d'avoir perdu ou de lui avoir donné (ce qui pour certains revient au même). De plus même si vous le lui demandez, que vous l'implorez, en bref que vous voulez le faire sentir important, il ne le sera jamais et n'osera jamais vous déranger. A bon entendeur salut.

Ode à la gloire des mouches

S'il existe présentement un vous un peu concret auquel je m'adresse, n'hésitez surtout pas à dire ce que vous en pensez car c'est un essai.
Du haut, très haut de la commode,
Du plafond je scrute vos têtes basses et honteuses,
Vos poitrails soumis, noblesse chevaline, noblesse bovine, noblesse ovine.
En silence j'aspire à la grandeur des maîtres mystiques,
Bordés de pourpre comme d'un fringant manteau de cuir vert
En silence j'admire l'élégance cuirassée des mouches.
En silence j'admire la laideur cuirassée des mouches.
En silence j'admire la souplesse cuirassée des mouches.
En silence j'admire la puissance cuirassée des mouches.
Ton nom se confie à moi de la faiblesse coupable de ton âme.
Avec adresse.  
Mon silence conseille le règne draconnien des mouches.
Mon silence affrète un navire.
Nous ne pensons qu'à vous retrouver, au loin sur l'île de Rhodes; où les Grecs
Bien Grecs et Rhodiens sculptaient, pensifs, des arabesques;
Mollement nous n'envisageons
qu'être vôtres de nouveau, et nous poser sur votre épaule molle et soumise.
Au coeur palpitant et suant de la foule endeuillée,
Mes yeux archéologues de ta vieille âme rassie
scrutent la purulence magnifique des mouches.

La mouche croise ses pattes musculeuses sur le tableau noir...
Avec élégance et grâce encore, vieille gisante de chevalière croisée de retour des croisades
Vieux gisant de roi ou de reine des mouches ailées membraneusement...
Ne pleurez pas son âme simple exilée au fin fond labyrinthique de cette dépouille répugnante,
Laquelle n'est que la pénultième de la pénultième de la pénultième de l'infinie
De la dernière de la dernière de l'infinie dernière de la dernière des mouches
En silence resplendit la douloureuse infinité des mouches
Pantins de cendre squelettiques avides de me survivre!
En silence j'admire avec rancoeur la perfide charité des mouches...