vendredi 29 octobre 2010

LE FANTÔMIME (suite 2)

Scène III. Bruits lugubres d'écoulement dans le lointain proche. Entre le Mime, titubant, l'air très gêné(exagérément).
LE MIME, à voix haute: Hoo!... Hoo!... Je suis rentré! Me revoilà! C'est moi, votre vieil ami!... Héé!...Héé!... Il y a quelqu'un, à tout hasard?... Non?... Hoh... Hoh! Pitié, de grâce, pour l'amour de ce que vous adorez! Une matronne!... Une soeur!... Un Bénédictin!... Un abbé... Un pauvre mendiant... Un... concierge... Mes maux se sont carrés comme des directeurs, comme d'impitoyables magistrats dans ce vieux siège de chair bouffie, dépaillée, qu'est mon vieux corps. Trop longtemps j'ai fait ainsi, par profession, voeu de silence dans le vide... La mort transpire par chacun de mes pores, je fuis sang et eau comme une écumoire! Mon maquillage... (il se frotte le visage. Traces livides.) c'est mon maquillage qui fond... Ah, non, c'est ma peau. C'est ma pauvre peau brûlée comme de la crème.(Haut, avec douleur) Aide-moi, Ô châtelaine! Je gémis sous la botte ferrée de ton silence... Regarde-moi, regarde-moi mourir! (il mime une agonie grandiloquente) Apportez une civière!...(Deus ex macina: deux anges descendent du plafond sur une planche, l'y déposent et remontent.)

BRUNOIS, bouge, se réveille; à Agarite: Ca alors, Agarite, tu as vu ça? Crois-tu que c'est parce que nous sommes dans un couvent?

AGARITE: Mais quel couvent, regarde ça, cette misère.

BRUNOIS: Ca te plairait, pas vrai, que des anges mécaniques nous emmènent tous les deux... Hors d'ici!

AGARITE: Dans le plafond. (un temps) Laisse, c'est probablement seulement ce qui arrive aux gens morts depuis longtemps. Ou à ceux qui délirent complètement. (ils gloussent).

BRUNOIS: Je me ferai peut-être prêtre. (un temps) Tu serais ma nonne?

AGARITE: Non.
(silence prolongé)
BRUNOIS: Quel froid, je m'ennuie.

AGARITE: Je pourrais chanter pour te distraire. (Elle chante sans attendre de réponse)

BRUNOIS: Pour te murmurer des paroles d'amour à l'oreille, il faudrait que j'aie moins mauvaise haleine. Et toi, tu miaules comme un homard. Manière de dire que tu chantes mal.
(coup de tonnerre; éclair. Entre la chose noire et rampante, un balai à la main. Elle s'avance jusqu'au milieu de la scène vivement, avec colère; elle s'apprête à frapper au plafond, hésite, renonce.)

LA CHOSE NOIRE ET RAMPANTE: Ah les jeunes. (Elle sort. Fin de la scène III. Fin de l'Acte premier.)                            
                                                     A PLUS TARD...

dimanche 24 octobre 2010

LE FANTÔMIME (suite)

Scène II: même décor; pluie qui fouette les fenêtres; vent qui hurle; lumière verdâtre par la porte qui se reflette sur le portrait. Tout le bruit vient du dehors.
LA CHOSE NOIRE ET RAMPANTE,tout bas, presqu'invisible derrière la table: Je sais, oui. Je l'ai toujours su. Tu auras du mal à le croire mais c'est comme ça. Hé oui, à toi seul je me suis révélé tel que j'étais et sans te polluer de mes commentaires mal venus, pour une fois. J'ai été tout à fait honnête, juste pour t'être agréable. Quoique je ne t'ai probablement pas été agréable. Et que c'était davantage dans le but de moi-même me rendre à moi-même moins vil-j'éspère que tu pourras me pardonner. Ce que tu as vu. A ton tour, veux-tu savoir. J'attends. Non? Très bien. Mais ne t'attends plus à ce que je te sois encore aussi complaisant, à l'avenir...

LE TRANSISTOR, grésillements; musique discordante; voix de présentatrice: RRRRR... "Neuf heures à Babylone, à RRRR Bavobylonav, " oeuvre du grand poète et compositeur... RRRR (rupture)

LA CHOSE NOIRE ET RAMPANTE: Voilà autre chose. Où étais-tu, toi, pendant toutes ces années? Je croyais que tu m'avais abandonné pour toujours pour ton...(il hésite.) Ton... ça n'a pas d'importance. De toute façon ça ne te fera pas revenir. De toute façon tu ne m'écoutes pas. Tu es déjà repartie. Voulais-je te parler un instant, un seul? Tu n'en as rien à faire.
(Murmures venant de la porte. Fouillis.)
Les revoilà, pour me tenir compagnie, c'est tout ce qu'ils savent faire. Ils n'ont aucun respect, ni pour les morts ni pour la tranquillité.
(Murmures de plus en plus. Fouillis.)
En absence du maître, ils font tous n'importe quoi. Moi-même, parfois, je me trouve plutôt ambivalent...
(Il se cache sous la table. Entrent Argarite et Brunois)

BRUNOIS, voix sifflante: Ouf! Tu as vu ce temps. Heureusement que j'ai eu l'idée saugrenue de revenir ici.

ARGARITE: Oui. Le temps était terrible. Nous n'y pouvions rien, vraiment. Mords-moi la main, Brunois,  jusqu'à ce qu'elle saigne.

BRUNOIS: D'accord! Tu as eu une bonne idée!

AGARITE: au contraire, c'est une mauvaise idée, je plaisantais.

BRUNOIS: Tu as eu tort de plaisanter, Agarite. La dernière fois tu as failli nous faire mourir!

AGARITE: Tu confonds, je crois, avec la dernière fois que tu as voulu éloigner de nous tout problème et que tu t'y es mal pris, en plus de ce que c'était simplement une mauvaise idée.

BRUNOIS: Tu exagères! Tout n'était pas de ma faute! de plus, c'était ton idée. Et elle était excellente, juste très mal conçue. Excellente, tout de même. Je dois le reconnaître.

AGARITE: L'idée de base émanait de toi tout de même. Reconnais-le!

BRUNOIS: Meilleure que celle de venir nous réfugier ici, chez la mère supérieure. Elle n'est jamais là! Elle nous aurait raconté une histoire!

AGARITE: Ca n'a pas trop d'importance, si elle nous racontait une histoire, je suis sûre qu'elle t'embêterait. Une religieuse, ça n'amuse, ça ne se fait respecter des gens comme nous que si ça a des histoires bien répugnantes à raconter; je ne sais pas si elle...

BRUNOIS: Elle... Je ne sais pas si elle en avait mais elle aurait pu tout de même. Laissons tomber. Cherche des débris de vieux draps, de quoi nous faire un lit.
(Agarite cherche à travers la pièce; elle arrache un drap sur un meuble; étonnement. Ainsi de suite avec plusieurs meubles.)
C'est plutôt bien en fait, je n'avais jamais remarqué! (Silence prolongé. Ils s'asseillent chacun dans un fauteuil et semblent s'endormir.)

LA CHOSE NOIRE ET RAMPANTE, sort de sous la table: Et voilà, nous voilà gâchés de nouveau. Si ce n'est physiquement, c'est moralement que nous serons morts dès ce soir. D'où venait-il, ce dernier? Qui l'avait invité? Pas moi, c'est la seule certitude que je peux me permettre. Il ne sait pas, non... Et pourtant je regrette presque qu'il soit reparti.
                                    Fin de la scène II

samedi 23 octobre 2010

...Voilà, petit drame... Dans la lignée des "gens qui mordent"

                                            Le Fantomime
 SCENE I
Un réfectoire d'un couvent de province abandonné. Nuit orageuse. Tables et autes meubles éparss, couverts de vieux draps poussiéreux. A l'avant-scène à droite, un portrait de religieuse dont le cadre est fait de sparadrap noir. A l'avant-scène à gauche, une porte ouverte sur un couloir; de même dimension que le portrait, et situé à la même auteur que celui-ci; le battant est détaché et posé à côté.
Sur une table au milieu, traîne un vieux poste de radio à transistor.

LE TRANSISTOR d'une voix de présentateur: Minuit, minuit! Ecoutez tous, ici il est minuit comme les douze doigts de la main, comme tous les soirs à la même heure... l'obscurité est RRRRR pareille, n'a pas son pareil RRRRR Ce soir, il est vingt heures  tout rond à New York et la Grosse Pomme s'endort impassible...

Coup de tonnerre. LE TRANSISTOR grésille. Musique de spectre; musique de clown; silence.
Entre, par la porte, LE MIME. Teint blafard. Il arrive en chancelant. Démarche mimesque. Regard effrayé. Fixe à droite et à gauche; expression d'angoisse grandissante. COUP DE TONNERRE: LE MIME couine et sursaute.

LE TRANSISTOR; d'une voix d'outre-tombe: Ici 08 radio-poubelle;... RRR stoires de peur qui font trop peur pour être entendues. Fermez la porte... Fermez la porte...

LE MIME,voix pleurante mais distincte. Sans bouger les lèvres: Où suis-je? Où ainsi me portent les destructrices passions et les fantaisies de mon être?... Nous sommes loin, oui loin, très loin sur le chemin de l'ultime poussière!
Coup de tonnerre. Entre UNE CHOSE NOIRE ET RAMPANTE.
UNE CHOSE NOIRE ET RAMPANTE, s'adressant, dans un souffle, au transistor qui grésille: Alo, alo, qu'as-tu? Encore ton mauvais rêve? Attends, je te distingue à peine, je vais chercher une chandelle... Où es-tu? d'habitude chaque éclair ravive ta carcasse blanche... Elle sort. Un moment s'écoule.
LE MIME, même jeu: Où toujours vins-je m'échouer, sans ressource, quel est ce château? A qui appartient-il? Quel en est le châtelain?
LE TRANSISTOR, grésille puis chante: La tour prends garde, la Garde, prends peur! De te laisser abattre... Je suis, je suis la rose de Saaron et le lys dans la vallée... Ton nom, ton nom est comme un parfum répandu, ton nom n'est qu'un parfum répandu, ton nom se confie à mes yeux de la bassesse de ta vieille âme moisie...
Entre UNE CHOSE NOIRE ET RAMPANTE, une chandelle éteinte devant elle:Qui va là?
LE MIME, même jeu: Hélas, je le sais, le châtelain, c'est la mort... S'adressant à la chose noire et rampante, bougeant les lèvres: Sais-tu, ô concierge, où est la maîtresse de maison? (Il tremble)Je tremble de froid et la faim me dévore...
LA CHOSE NOIRE ET RAMPANTE; voix murmurante et familière: Alo, alo, que fais-tu là donc?
LE MIME, même jeu: Ô concierge, je cherches un abri contre le vent et la pluie; mon âme est toute délavée et les esprits me murmurent des absurdités que je rougirais de comprendre...
LA CHOSE NOIRE ET RAMPANTE, ton de compassion: Madame est absente, et je ne sais si elle reviendra. Alo, tu n'es pas censé parler, retourne d'où tu viens...
LE MIME, ton implorant: Ne peut-on seulement me servir le couvert? Je mourrais!
LA CHOSE NOIRE ET RAMPANTE, s'accroche d'une main sur la table où est posé le transistor: Ne fais plus attention, tu mourras de toute manière... Je te croyais d'ailleurs déjà mort. Retourne d'où tu viens.
LE MIME sort.
LA CHOSE NOIRE ET RAMPANTE, voix faible: Vieux cauchemar. (Elle sort)
LE TRANSISTOR, grésille puis, voix de présentateur: Quatre heures à Chisinau, quatre heures à Chisinau! RRRRR Le soleil s'éreinte doucement, vomante, sur les côtes dorées de la Baltique. Et moi qui, solitaire, errais entre quatre infinis, entre quatre murs bien distincts les uns des autres...( il grésille, puis se tait; fin de la scène I)
                                                                  La suite plus tard

jeudi 21 octobre 2010

Aventures maritimes

Féru d'inertie je vis pourtant de multiples fois les ports, malgré vents et marées qui est-ce la meilleure ou la pire occasion de le dire, m'y voulaient retenir une grosse partie de ma vie sur terre. C'est-à-dire en ce bas monde! Ce n'est comme vous l'aurez compris, qu'une simple expression. Le grain en vérité et autres amabilités du ciel me retenaient non seulement loin des océans mais encore loin des côtes et en fait de toute étendue d'eau. C'est dire si je suis léger tant en acte qu'en masse. Je m'engageai d'ailleurs, ou pourtant -je ne sais-, dans l'équipage d'un vieux baleinier dont l'arachnéenne mâture emmêlée dans les câbles et haubans de ses voisins pleins d'irrespect, s'élevait haut dans les cieux figés comme une affreuse aquatinte vomie par quelque mauvais peintre, et le tout avait la même odeur de graisse pourrie de vieilles baleines catharrheuses. J'avais choisi ma galère avec soin pensais-je, quoiqu'avec l'inexpérience de mon âge ( alors j'avais dix-sept ans). Et pour d'autres qualités que son parfum ou ses voiles. D'ailleurs c'était aussi un vapeur. J'avais longuement observé, au contraire, loin au fond de ses entrailles, la forme de sa quille et de sa coque et elles m'avaient parues satisfaisantes voici comment.
Un navire à cale en forme de larme est bien plus rapide que n'importe quel aéroplane, même les plus anciens. Visitez la cale en forme de larme d'un navire: du moment que vous n'avez accès à aucun hublot, vous ne verrez rien et vous pourrez quitter le port en ayant la conscience tranquille sur le point que vous ne le quitterez jamais. L'effet est comparable à celui de l'éther lorsqu'on s'y trempe; vous êtes fidèlement réel et vous savez raisonnablement le contraire. Un navire bien conçu ne porte pas sur l'eau, car il n'y a pas d'eau; il porte là où il semble utile qu'il porte. C'est-à-dire n'importe où. Nous mîmes les voiles sans penser à cela, ni à rien d'autre qu'à la liberté. Trois jours durant nous voguâmes loin devant, inconscients, pleins d'espoirs.
 Or la cale du navire n'avait pas la forme d'une larme mais d'une goutte; son pilote était pour comble de malchance atteint de la goutte volante d'où ce que non seulement le navire fit naufrage mais encore...
Il s'envola. Nonobstant son impressionnant tonnage il partit en vrille et notre second se décida à nous saborder.
Mais restons sérieux: toute volonté qu'en ait sa carcasse pourrie, ce tas de ferraille ne put pas même atteindre la brume qui baignait comme une huile blanche baveuse à la surface déchirée des flots. Tout, à la vérité, semblait perdu pour nous car l'eau était bien réelle ainsi que me le prouva aussitôt mon microscope, et elle nous submergeait telle une moisson de débris de planches de voiles et de marins. Comme j'achevais un modèle réduit de notre navire quelque chose d'improbable se produisit: l'original fit un demi-tour dur lui-même, verticalement, et sans l'intervention d'un dieu ma maquette était perdue. Les vagues se brisaient désormais à grand fracas contre les mâts sans parvenir à les briser. Tout le monde à bord vomissait, et ceux qui ne le faisaient pas étaient malades à cause de l'odeur et joignaient leurs propres et sales entrailles à la marée commune; chasser cette épouvantable odeur par les hublots était impensable aussi dus-je utiliser un vieux harpon à baleine. Ceci était réputé imprudent et la suite me le prouva douloureusement.
   En effet une baleine mêlait ses tonitruants remugles bêlants et grondants à l'ardeur épouvantable des flots déchaînés; je ne sais si elle avait reconnu  surtout en pleines ténèbres aqueuses et gerbantes la profession de ce qu'elle attaquait ou si simplement elle était d'une humeur à détruire un vaisseau; ou si tel l'océan déchaîné elle détruisait à l'aveuglette ce qui passait pour ainsi dire sur son ventre énorme...
  Son oeil unique, minuscule lanterne blanche dans les profondeurs néantiques, nous fixait sans éclat mais avec folie, comme un calamar...
     Si la suite intéresse, elle viendra.
     Le Néant marin que nous affrontâmes, veut-il savoir comment encore je médirai de lui, avec quelle nouvelle perfidie j'abaisserai son image; il n'aura qu'à attendre lui aussi la suite.

Un conte du Nain: débolescences d'un brave vieil homme

  Fut un temps ou le comte était heureux, heureux d'une manière terrible, pris d'un délectable respect naïf quand le hasard le confrontait à une Vénus Anadyomène ou à une Victoire quelconque; il vivait énormément et, n'ayant aucun moyen de payer il s'écoule et passe ce qu'il n'a qu'un droit naturel de posséder, dans une oisiveté presque béate pendant que son corps affronte vents et marées avec joie.
   Je le revois encore récemment à un festin ou à une bataille, dubitatif et timide; il s'imagine avec plaisir qu'il survit sur le champ de bataille où le hasard l'a traîné au milieu des mitrailles volantes et du boucan; en vérité il commande à une batterie d'artillerie. Le colonel qui le supervise est son ancien professeur de mathématiques. Il le fixe avec sévérité. Il semble attendre que tout soit perdu pour lui faire des remontrances; les ennemis avancent sous les balles, avec le casque relevé en arrière; le comte est là et il combat sans peur.
"Voyez-vous, mon colonel,- fait-il avec une fausse modestie alors qu'on lui amène de minuscules canons et qu'il les refuse:- Je suis plus habitué aux gros canons. J'ai peur de ne pas savoir faire fonctionner les petits. Allez donc chercher des Nains! "Tout de suite monsieur"dit un lieutenant qui n'a que ça à faire et il se précipite dans le caniveau en oblique. Il a quatre laquais. "Tout est perdu monsieur" "Comment? Comment?"
"Je disais: les Nains se sont enfuis et ont refusé d'obéir." "Comment? Comment?" "Je disais: s'ils ont voulu entendre, ils n'ont pas voulu répondre."  "Est-ce un moment pour déserter?"demande le comte rougissant d'une colère noire."allez les chercher et détruisez-les!" Ailleurs le massacre est général. Le colonel est mort. Mais rien n'y fera, ni les armes ni les mots. Ils se sont tous réfugiés dans un arbre dans les alentours. "Priviét", leur a dit un Russe. "Priviét", leur a dit un renard. Quand ils furent bien convaincus qu'ils pouvaient descendre sans risque, ils demeurèrent coincés. Les quatre Nains dans le creux de l'arbre. Ils voient briller dans les ténèbres, les contre-épaulettes du lieutenant lancé à leur poursuite. C'est en vain qu'ils l'appellent à l'aide. "Donnez-moi la main", leur dit le Russe doté d'un fort accent. "Donnez-moi la main", leur dit le renard doté d'un fort accent. Tous deux penchés très bas dans le creux de l'arbre; ils y disparaissent à moitié, et manifestement impuissants tous deux à  aider les Nains.
   Le comte exulte dans sa forge, noir de suie et de blessures, maltraitant le métal au marteau, au poing, maltraité par lui: le nouveau canon, enfant immonde à la gueule dentelée et rayée d'acier dégoulinant, est certainement d'un genre inédit! J'ai envie de l'hubris! Amenez-moi une bataille!
   Et chaussant ses épaulettes de diamant, il s'élance sur un ennemi velu, hirsute, grognant et grouillant; une faille sur toute la longueur insectienne de sa noire armure, une seule faille, où le coeur en personne est saillant et rouge...
   Sous les plaques d'acier que les dents pointues déchirent par bouchées, il porte une cotte de maille, et un uniforme d'amiral; il suffoque et fuyant la mêlée perdue, s'élance vers la mer et s'y jette... De là jaillissent déjà des creux des vagues, des creux des roches, les ennemis, les galères, les galéasses, les caravelles, les cuirassés, les sous-marins aux gueules béantes et hérissées de dents en fait de poils... et la peau invincible, glissante, gluante où même le marteau frappe en vain et lentement, dans l'onde; la victoire, la victoire n'en est que plus retentissante! Les requins des abysses refluent et sont pourchassés jusques au fond des ténèbres couleur de vin... Quelque chose flotte entre deux eaux, s'envole comme un gigot, comme une jambe blanche et déchirée qui sautille sur le sable clair; et le sang s'envole et se dilue comme fumée dans l'onde froide et criante...
   Un dieu, vieux faucheur de la mer sans moisson fait lever une tempête, et sa surface énorme sublimement bubonique se gonfle comme la peau dorée d'un gâteau... l'écume fume et les nuages aux quatre infinis de l'horizon, enclisent cette part du lion avec gourmandise... Le vent s'enroule et souffle les bougies de son millionnième anniversaire d'infini.
   Revenu à la surface depuis longtemps déjà, le comte voit amèrement fondre les bougies de ses ans sans avoir le courage de les souffler lui-même, de leur donner raison.
   Son épouse a treize ans. Elle pourrait être sa fille s'il avait vraiment l'âge qu'on lui donnait aisément. Il n'en a que dix-sept.

mercredi 20 octobre 2010

Les gens qui mordent (1)

 Rien n'est plus désagréable, quand on se promène avec la fausse quiétude de la jeunesse, que de voir se réaliser ce que l'on supposait de plus horrible dans l'humanité ou, plus modestement, dans une classe déterminée de personnes. Se faire mordre à son passage par quelqu'un dont c'est le loisir, n'est qu'un exemple de ces incivilités qui referment lorsqu'on s'est assagi, donc aigri, sur le postulat que les gens sont méchants mais qu'il se peut à l'occasion voir des gens gentils- mais alors ils ont un nom, qui les exclut du groupe très étendu quoique fermé des gens. Caste à laquelle personne n'appartient autrement que sous une forme très floue; dont même, ou surtout, les arêtes les plus pointues, les plus giclantes, sont émoussées.
 Le flou est tout ce qui définit, ou anti-définit cette entité gélatineuse à multiples têtes.
 En voici un exemple, mais ce n'est qu'un exemple qui de la sorte enfreindra même les moins claires des classifications. Il s'agit dans un premier temps de se lever tôt: Albert se leva tôt, ce que font bien d'autres, bien décidé à amener face à lui l'échéance d'une affaire difficile. Il n'y a à franchir qu'une petite esplanade d'une centaine de mètres sur deux cents; c'est rare, à la vérité, que ce soit de la sorte l'affaire qui s'amène à Albert au lieu que ce soit Albert qui aie à faire un vrai trajet, à prendre le vélo, à bien sentir la serviette qui pend de côté, à bien sentir qu'il est effectivement parti et que c'est effectivement quelque chose de sérieux qu'il va faire. C'est sans doute dans cette optique qu'il a pendant longtemps, sous-estimé l'adversaire; l'humiliation du cuisant échec qu'il avait subi au début est passée heureusement, l'ennemi n'est plus là, il a quitté les lieux, il ne reste plus à proprement parler qu'à signer les papiers; ensuite on lui remettra la clé de l'entrée principale de la maison, ensuite sans doute rentrera-t-il tout de suite dans la sienne, tranquillisé, plutgôt que de s'attarder à visiter une maison dont il a fait maintes fois le tour en rêve, tant battant et impatient; d'ailleurs elle n'est pas à ce point belle que cela se justifierait. L'entrée n'a plus la même impressionnance, il y a toujours le portique en triangle à la grecque mais il est incontestablement plus petit. Sans doute parce que le propriétaire n'est plus devant avec sa lorgnette et son mousquet pour maintenir Albert à distance et lui cacher ainsi l'insignifiance de la maison. En quoi il était évident qu'il ne faisait que le provoquer. S'il avait été possible de voir avant, les choses auraient été bien, bien plus simples.
Personne n'entrave la forme modeste et charmante de l'entrée; juste après l'entrée, la silhouette de la maison, carrée au niveau du vestibule, suit une brusque courbe jusqu'à rejoindre la surface du sol et se confondre avec l'esplanade. De l'autre côté, le quartier est très paisible, il n'y a plus que quelques tours basses avec peu de fenêtres.
 Albert s'avança avec confiance, ou plutôt sans la moindre émotion et le moindre sentiment, comme devant n'importe quel rocher sans vie.
"Non, avait répondu le propriétaire d'une façon catégoresque. J'aime ma maison, et elle est à moi, je l'ai aménagée dans un style gothico-néogothique qui me plait énormément, aussi je n'ai aucunement l'intention de vous en rien céder.-Puis, devant son insistance:-Vous croyez pour vous en prendre à plus petit que vous, que vous avez certainement raison? Avisez après cela. Ma famille habite ici depuis des génératiuons, j'aurais de la peine à me souvenir du nombre exact et ma faible mémoire n'enlève rien croyez-le, au fait que mes racines ici sont profondes." Avaient suivi des imprécations terribles. La guerre avait éclaté entre les deux adversaires. Comme Albert était dans ce cas-là, le seul élément à perturber un ordre qui sans lui paraissait stable, il ne pensa pas à faire effectivement appel à ce qu'il était en effet plus grand que le client. Il chercha même d'abord à paraître plus petit; et par une perfidie qu'il imagina être tantôt l'énergie du désespoir, tantôt un affaiblissement réel, le client se fit toujours proportionnellement plus petit, de sorte qu'à aucun moment Albert n'eut l'opportunité, qu'il guettait, de bouleverser les rôles afin de au moins transformer la situation sinon vaincre immédiatement. Quand il ne fit plus la taille que d'une punaise, et que face à lui le client ne faisait plus celle que d'un grain de sable, l'espoir le quitta d'une victoire rapide. Aucun des deux n'en démordit pour autant et la situation s'enlisa très vite. Albert ne put même jamais s'introduire dans la maison, le propriétaire était toujpurs à proximité, les griffes parées à déchiqueter tout ce qui s'avancerait un tant soit peu furtivement de l'entrée.
 De la sorte, l'un et l'autre les yeux rivés sur la porte d'entrée, concentrés de toutes leurs forces sur ce point, capital s'il en est, la situation pouvait rester ainsi indéfiniment. Cela n'était certes pas le projet de l'un et de l'autre, l'un parce que cette situation nuisait à sa tranquillité, l'autre parce que ce n'était rien moins qu'un échec, et même plus: la ruine de sa carrière si prometteuse et si intéressante. Dans cette optique, de la même manière symétrique, chacun avait patiemment tissé un piège, l'un dans l'autre; c'étaient deux pièges aussi mortels qu'ingénieusement conçus: extrêmement infaillibles. De sorte que les deux belligérants étaient demeurés pour ainsi dire parallèles l'un à l'autre, l'un prisonnier à l'intérieur et l'autre, prisonnier à l'extérieur. Ainsi la situation demeura de nouveau figée et les deux bords, symétriquement inexpugnables.
 C'est à se demander, vraiment, comment Albert a pu se convaincre qu'il avait gagné, même au bout de mois et de mois de siège, même en n'ayant jamais douté de lui. Sans aucun doute, à la mesure de ce que le client s'était convaincu d'avoir perdu. Ce n'est peut-être pas la raison, mais c'est pour l'heure la seule possible.
 Arrivé devant la maison, Albert s'avança précautionneusement de la porte, jusqu'à la poignée, et puis il s'arrêta- davantage en hommage au bon vieux temps que par méfiance, par superstition, il se posta, se mit à attendre qu'un moucheron passe, là, à cet endroit précis, pour voir si le piège n'était plus efficace; normalement, il est désaffecté; mais on ne sait jamais. Et il pourra attendre longtemps, la saison prochaine, car il n'y a aucun moucheron; il n'y en aura jamais.
 IL s'énerva un instant, saisit au sol une poignée de gravillons et la lança contre la porte. La plupart des gravillons fut freinée et demeura en suspens à quelques centimètres de la porte, mais pas davantage à priori qu'avec une toile d'araignée ordinaire. Pour s'assurer Albert passa lentement la main sur la surface irrégulière de la porte. Elle rendit un imperceptible grognement creux, vide, puis se tut tout-à-fait. Satisfait, il ne jugea pas utile de s'attarder et retourna sur ses pas; irrégulièrement, sur toute l'esplanade, le jour silencieux s'étendait.

dimanche 17 octobre 2010

Méditations de Bastilde

Bastilde méditait seul en un lieu solitaire, il n’en avait parlé à personne et si je ne l’avais vu de mes propres yeux jamais je n’aurais soupçonné ces tourments, qui passaient pour ridicules tant que terribles. Il n’était tous ces jours que l’ombre de lui-même, l’ombre donc de pas grand-chose et ni la  maigreur qui le contaminait de jour en jour, ni rien de son air tragique ne chassait l’ombre qui l’auréolait, le précédait où qu’il aille, et le rendait flou, taciturne et, au sens le plus propre du terme, lointain. Tout en sachant que d’une façon assez générique chez cette âme fragile et frivole, il n’en allait pas de beaucoup. Cependant il avait vu quelque chose, il avait appris au détour de sa correspondance avec les vivants, un nouveau sujet d’inquiétude.
« Je suis mort, maugréait-il au désespoir ; ou, du moins, les autres croient que je le suis. Ce qui suffit hélas pour m’ensevelir à jamais… » Comme l’hiver s’avançait, un peu prématurément, je le vis souvent s’interrompre longuement dans ses habituelles fluctuations à droite et à gauche pour se pencher sur les livres, jusques au point que ce furent ses fluctuations qui devinrent rares et inhabituelles ; il s’enfermait, au sens le plus basique du terme, il s’enfermait dans la tour des jours entiers blancs et noirs et maussades comme à fixer par la fenêtre les gouttes de pluie qui demeuraient pendues en suspension à rire à sa froide figure creusée. « Peut-être, ruminait-il : peut-être que je me trompai entièrement, peut-être les squelettes sont-ils nos amis ainsi que quelqu’un me le dit un jour ? » Les arcades noircies de ses sourcils s’arrondissaient et restaient anguleux de mortification et de désespoir. Son visage s’alanguissait et tombait à vue d’œil en déconfiture. « Sommes-nous, pensait-il : sommes-nous plutôt de la chair avec un squelette à l’intérieur, ou bien un squelette avec de la chair autour ? C’est là ce qu’il me faudrait savoir… »
« Et si j’étais réellement un squelette, comme je le croyais puérilement il y a quelque temps ?... Cela serait la réponse logique de ce que je me hais et me suis toujours haï sincèrement… C’est quelque manie humaine de déporter sur l’objet réputé autre ses propres travers ridicules… »
« Tout le monde alors serait un squelette, » conclut-il avec amertume, ou il croit conclure parce qu’il veut se rendre le plus odieux possible ; pour se pouvoir consoler plus facilement ; en se trouvant les qualités qu’il s’est toujours sues, ou supposées. Son regard mort se pose un instant sur une miniature de Vanité posée face à lui… Il l’observe un instant, pris d’une curieuse gourmandise ; il tape alors du poing sur la table, qui semble en trembler, céder même sous l’incroyable puissance de l’espoir qui l’envahit : « Non !! »s’écrit-il : «  non ! Non, je suis : quel délice ! Un HUMAIN ! Ô plaisirs de la chair, plaisirs de la vie, me revoilà ; me revoilà ouvert à vous et prêt à me vautrer en vous !!Hu hu, triomphe-t-il : Eat exuding oinks upon and bleed decrepit broken bones in caustic spells of hell ! Eat exuding oinks upon and bleed decrepit broken bones in caustic spells of hell! EAT EXUDING OINKS UPON AND BLEED DECREPIT BROKEN BONES IN CAUSTIC SPELLS OF HELL!!!!”
   Sincèrement toujours, aussi sincèrement qu’il était entré plein de lugubres pensées, il sortit en chantonnant et traversa le jardin glacé, saluant chaque plante, saluant avec pitié chacune de ces plantes cristallisées, figées et dépouillées, et mortes pour beaucoup quand lui était si bien, si bien, peut-être un peu froid toutefois… Un bon feu, pensait-il avec délectation : une bonne ragougnasse chaude, vite ! » Il entra avec négligence presqu’en bousculant la cuisinière, peut-être en le faisant exprès parce qu’il avait très envie de manger.
« Hé bien maître, fit-elle sans se vexer, avec plutôt une sorte de pitié abjecte : vous êtes-vous vu ? Il ne fait pas bon jeûner ainsi voyez, vous ressemblez, comment dire ? A un squelette ! »
Effaré, glacé d’un coup, un affreux coup au cœur, Bastilde tomba mort à la renverse, crut-il ; il ne trouva quelque maigre et paisible réconfort que ramené en hâte dans son lit et recouvert de son linceul, en regardant au plafond la tapisserie, trouvée horrible en des jours meilleurs ; les squelettes qui y étaient représentés, dansant, grotesques, piquaient entre lui et son nouvel état supposé comme une invincible et superstitieuse frontière.

samedi 16 octobre 2010

Un port quelconque

 Comme promis, si je ne parle pas tout à fait dans le vide(quoique tel serait le cas même si quelqu'un lisait ceci: cf Pascal!), donc si j'ai effectivement fait une promesse à quelque chose de vivant, voici une approche du fameux port de Gdäänsk (Pollande). Pour ceux qui auraient atterri là par l'élogieux intermédiaire de mon cher ami Monsieur, les noms tels que Craboulique et autres barbarismes ne seront précisément pas des barbarisme mais une sorte de port d'attache ce qui aura l'avantage de rendre moins encombrante la présentation.
   Ceci concernera donc le grave port de Gdäänsk dont je devais déjà vous parler, et plus généralement la belle île de Pollande que j'aime tant; et beaucoup plus généralement encore quelques bouts de terre dont celle-cy fait partie, partie insignifiante d'ailleurs qui rend d'autant plus insignifiant le port de Gdäänsk. Voilà pour le port de Gdäänsk. Cette terre resta en effet loin pour longtemps, s'il faut vous conter l'histoire à ses débuts, des turpitudes et convoitises du monde.
   Je passerai sur sa conquête par les Crabouliques, à l'aube des temps, car elle ne posa absolument aucun problème et demeura aussi densément peuplée de crocodiles et d'hommes-grenouilles sous-évolués. Tout se passa en effet sur de plus vastes continents que d'aucuns doctes nomment(du Nord au Sud): Avroux; Grand-Popidia (qui alloit à changer de noms de manière que l'on verra) et Klavaille. Le premier, grand désert de roches, et le dernier, grand désert de glace, n'eurent d'abord aléa s'en cacher, importance mineure. Le grand lieu et le plus objectivement vaste était Grand-Popidia; il estoit ainsi nommé parce que son inventeur se nommait Popidius, estoit venu des lointaines contrées où s'étendait l'empire craboulique que l'on nomma de la sorte et pour quelque temps, la Métropole.
  Voicy qui est manière d'introduction, que modeste que se trouve, à la longue histoire qui fut celle du Grand-Popidia et qui devint celle malgré d'elle, de l'île de Pollande. Le prochain sera, toujours sur les temps de la conquête et de l'expansion, sur les temps justement des premières conquêtes et premières expansions.

Aventure de tombeau: une aventure de Bastilde

   Bastilde, résidant au fin fond des fonds bas de la ville de C***, est un sinistre parasite; il n'a donc aucunement la place que je ne lui accorde qu'à regrets et pour la seule raison qu'il m'en a supplié avec l'argument que lui n'avait ni bras ni jambe et ne savait pas se servir d'un clavier. Il se croit un squelette. Mais il ne se crut pas toujours un squelette. Un temps il se crut un Nain; un autre, il fut persuadé d'être ce qu'on appelle quelqu'un de normal. Son penchant macabre ne commença que lorsqu'il se mit en tête de ne plus visiter les catacombes comme d'autres visitaient à l'époque où il a vécu, des zoos à humains. Voici la raison du moins que l'Imprudent me donna de ce brusque changement d'attitude; comment il cessa de considérer les squelettes comme une race inférieure...
"Il ne vit que trop, bien trop et trop tard encore, bien trop tard, le squelette qui lui faisait face. Il était étrange. Il était immobile comme le sont les squelettes et les morts en général, mais malgré l’épaisse croûte de poussière noire qui le recouvrait, on devinait qu’il n’était dans cet état que périodiquement, pas toujours ; pire : qu’il affectait cette pose particulière à ceux de sa condition ; restait à savoir si ces derniers affectaient sincèrement, pour ainsi dire, le rôle et la pose de cadavres, d’objets sans vie et désarticulés, ou s’ils étaient, ce qui était plus grave, solidaires, en quelque sorte, de ce squelette-ci ; si donc ils étaient semblablement possiblement vivants, à même d’entendre, d’éprouver, de ressentir ; si en somme ce squelette-ci n’était pas l’exception qu’il avait semblé être et qui avait effrayé d’abord, comme quelque chose d’anormal, de monstrueux. Bastilde recula, effrayé et dégoûté à la fois à la pensée que le squelette pouvait avoir entendu ses remarques désobligeantes, qu’il avait pu les comprendre et en éprouver du ressentiment, et peut-être concevoir une revanche, pire, pire s’il était en effet solidaire des autres squelettes, qu’ils pourraient non seulement se le dire mais encore se rassembler et préparer ensemble cette revanche… Il voulut se rassurer en se disant que le squelette ne pouvait pas se déplacer, ni pour ameuter ses « semblables », ni pour accomplir l’acte basique de la revanche ; mais à peine s’était-il dit cela qu’il entrevit l’affreuse possibilité selon laquelle le squelette pouvait crier. En criant, il ameuterait ses semblables et c’en serait fini de Bastilde. Fort heureusement, pensa ce dernier, pour le nombre de fois où l’on a tenu des propos désobligeants devant un squelette, et qu’aucun n’a jamais crié, on peut considérer que la chose est impossible. Mais à peine avait-il mis en place bancalement cet argument raisonnable, que le squelette cria ; du moins le crut-il. Il pria pour que ce soit seulement un squelette susceptible, que ceci serait sans suite, ou bien que le squelette avait crié pour une toute autre raison. Mais s’étant dit cela, il s’aperçut que c’était lui qui avait crié, lui-même. Du moins chercha-t-il à s’en apercevoir, à s’en persuader. Il ne voulut plus se dire autre chose, que cela et que ce qu’il valait mieux laisser les morts à leur respectable place ; et saluant les restes momifiés avec une obligeance superstitieuse, il passa son chemin dans le catacombe."    
 "Le squelette est, mon ami, une bien étrange créature de laquelle il est bon de se méfier... d'autant plus infiniment plus, que certains se trouvent à l'intérieur de nous... et nous susurrent à l'oreille, à laquelle par un flagrant défaut de nature ils ont un accès direct, qu'ils sont nos amis...
 "Pardonne si j'achève un récit qui me tue: ce qui me fait le plus de mal est de savoir qu'il me survivra... pire; qu'il vivra après moi... Le traître! je n'écoute pas ses conseils empoisonnés, ainsi que chacun de civilisé en devrait user. Je le casse souvant pour lui apprendre quoi même que par une vengeance abjecte sa douleur soit mienne aussi... Mais rien n'entamera ma volonté."

Gdäänsk (Pollande)

Voici une vue terrestre du port de Gdäänsk, en Pollande. Vous ne savez pas où cela se trouve et je vous en suis gré... Je vous l'explique très bientôt dans le cadre de la prochaine finestre, consacrée aux Invisibes.

Fizodia, central business district 1839

Bienvenue là où vous êtes

Bienvenue dans les ténèbres du Nain; si vous y êtes parvenu cela signifie que vous êtes l'Elu(e) et donc que vous avez du temps à perdre.
Si vous n'êtes que de passage parce que vous vous ennuyiez ou que vous cherchiez de l'exotisme, ou un exorciste, passez votre chemin mais n'oubliez pas de lancer une bombe sur le Nain sans quoi il vous suivra pour se venger. Le Nain outre cela vous souhaite la bienvenue ici, par pitié restez, j'ai quelque chose à vous montrer! Regardez, c'est pour vous! Ne m'abandonnez pas!